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Histoire économique de la France. de J-C Asselain Tome 2

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Histoire économique de la France. de J-C Asselain Tome 2 Empty Histoire économique de la France. de J-C Asselain Tome 2

Message  Cyprien Mer 31 Déc - 15:08

Histoire économique de la France. de J-C Asselain (vol.2, Points Seuil)

Le blocage de la croissance pendant l'entre-deux-guerres (2):

Introduction: La France cumule les déséquilibres de toute nature: dépression classique mais aussi inflation; succession des politiques de "déflation" et de "reflation"; plusieurs dévaluations;... Contraste entre ces difficultés économiques et le prestige de grande nation dont jouit la France après la première guerre mondiale. La France passe en quelques années d'un excès de confiance à une perte de confiance générale. Instabilité économique, perte d'influence internationale. L'affaiblissement l'économie française au cours de cette période ne s'inscrit pas dans une tendance de fond antérieure à la première guerre mondiale. Ce sont donc les conditions entièrement nouvelles de la dépression des années 1930 qui ont porté un coup décisif à la modernisation de l'économie française. 1930 est encore pour la France une année de relative prospérité, la "contagion" s'effectue de manière très progressive, à travers la dégradation du commerce extérieur. Parmi les pays industrialisés, seuls avec la France les Etats-Unis ne sont pas encore sortis de la dépression vers 1938. "Retournement historique".

I/ Les déséquilibres de l'après-guerre (1918-1929):
1) Le bilan de la guerre et le problème des réparations:
Parmi les grands pays belligérants, la France est sans doute proportionnellement le plus touché. Pertes humaines: militaires, énorme proportions de tués parmi les élèves de grande écoles, vieillissement, déficit des naissances, charge des invalides, veuves de guerre et des orphelins, pensions des anciens combattants,... Dommages matériels: combats sur le territoire, charge des sinistrés,... Conséquences financières: réduction des créances sur l'étranger, endettement, problème des "dettes interalliées", endettement auprès des particuliers (mais inflation...), etc. Explique l'âpreté dont le gouvernement français a fait preuve envers l'Allemagne: "l'Allemagne paiera". Le problème des réparations est à l'origine de conflits qui ont joué un rôle majeur dans les déséquilibres de l'après-guerre (...). Le différend porte en premier lieu sur la liaison entre les réparations et les dettes interalliées. Le second désaccord est sur le montant des réparations à exiger de l'Allemagne (le montant devait s'élever à 132 milliards de marks-or, dont 52% pour la France). Si on suppose le paiement de l'indemnité calculé sur 30 ans, l'annuité doit s'élever (compte-tenu des intérêts) à environ 15% du revenu national. Problème du mécanisme de transferts se pose de manière fort différente: pour pouvoir payer, l'Allemagne devrait être plus forte économiquement que jamais, éventualité refusée par la France; le problème dans ces conditions était sans doute insoluble. Le versement des réparations s'applique de plus en plus mal: occupation de la Ruhr, effondrement du mark, désorganisation de l'économie allemande, toutes les parties sont perdantes. Plan Dawes (1924). Amère désillusion: l'écart est à coup sûr impressionnant entre les exigences initiales et ce que la France a finalement obtenu; l'excédent reste, malgré tout, substantiel pour la France. Les erreurs politiques et techniques commises à propos des réparations ont eu, cependant, des conséquences très préjudiciables. L'échec des réparations apparaît comme un facteur décisif de la crise monétaire.
2)De la crise monétaire à la stabilisation du Franc:
Impression d'absurdité. Durant près de huit ans, la crise monétaire semble s'aggraver irrésistiblement, puis, d'un seul coup, en juillet 1926, la formation du gouvernement Poincaré met fin immédiatement à la spéculation contre le franc, le franc devient même une des monnaies les plus solides. Le 19è siècle dans son ensemble le souvenir d'un siècle de stabilité monétaire exceptionnelle. Vers 1918, le dogme de l'étalon-or règne. Division droite/gauche par rapport à la question de l'impôt sur le revenu, puis sur le capital. Les décisions impopulaires sont difficiles à prendre dans un tel climat d'affrontement politiques ("Grand capital", "Mur d'argent",...). La crise inflationniste se manifeste par plusieurs types de déséquilibres, étroitement liés entre eux: la hausse des prix de gros et de détail, la dépréciation du cours du franc sur le marché des changes, le déficit budgétaire permanent. Le déficit courant est moins une cause qu'un résultat; si l'inflation doit être attribuée au déficit, c'est essentiellement le déficit accumulé pendant la guerre qu'il faut tenir pour responsable. Autrement dit, le fond du problème, c'est l'énorme augmentation de la dette publique. Gouvernement Poincaré: "gouvernement de têtes", programme de redressement, éclectisme (volonté d'être au-dessus des partis), mesures psychologiques et mesures classiques de politique monétaire. Les résultats immédiats ont été au delà de tout espoir. Aussitôt, le taux de change se redresse et la spéculation se retourne. Conjonction de facteurs favorables: plan Dawes, effort fiscal commence à porter ses fruits, inflation . En termes réels, la charge de la dette se trouve diminuée dans la même proportion que la hausse des prix: telle est la cause fondamentale du succès de 1926. Si Poincaré n'est pas le "magicien" que l'opinion a vu en lui, son mérite réel est ailleurs. Sa perspicacité se manifeste notamment dans les deux décisions successives qui constituent la stabilisation monétaire proprement dite, stabilisation "de fait", puis "de droit". Stabilisation de fait: novembre 1926. Le gouvernement a eu la sagesse d'écarter la solution du retour à la parité-or de 1914. La question est définitivement tranchée par la loi monétaire de juin 1928 ("stabilisation de droit"): le franc est désormais défini par un poids d'or de 65.5 mg, correspondant au 1/5 de sa parité-or de 1914. Le "petit France de quatre sous". Deux conséquences: le franc étant tenu désormais pour une monnaie solide, les capitaux étrangers continuent à affluer; le franc demeure légèrement sous-évalué, ce qui maintient un avantage pour les exportateurs français.
3)Le redressement de l'économie française:
Vers la fin de la guerre, l'activité économique est très déprimée. A partir de ce niveau très bas, le redressement a été plus vite que prévu. En 1929, l'économie française a "rejoint sa droite de trend". La progression de l'activité économique est non seulement rapide, mais étonnamment régulière eu égard aux déséquilibres dont il a été question plus haut. Cette période correspond à l'une des phases les plus libérales de la politique commerciale française. L'économie française, et notamment l'industrie, fonctionne ainsi durant plusieurs années "à plein régime". La période 1900-1930 dans son ensemble apparaît ainsi comme la phase décisive de l'industrialisation française. Résorption du chômage. Exode rural. Immigration étrangère. Remodelage de la géographie industrielle. Les progrès de la productivité qui jouent un rôle décisif. Réduction du temps de travail. Ombres au tableau: les textiles, écart entre la France de l'ouest et celle de l'est. Mais le phénomène le plus grave est sans doute la stagnation de la production agricole. L'agriculture française souffre toujours de ses coûts de production trop élevés, de l'inadaptation d'un grand nombre de petites exploitations familiales. La "prospérité" des années 1920 n'est donc pas générale, et les fruits de la croissance sont très inégalement répartis entre les différents groupes sociaux: les profits industriels sont particulièrement élevés, un grand nombre d'industriels vivent dans des conditions difficiles, les salariés sont dans une condition intermédiaire, le traitement des fonctionnaires, en revanche, ont augmenté davantage. Ce n'est que rétrospectivement que les années 1920 apparaîtront comme une grande période de prospérité.

Cyprien
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Histoire économique de la France. de J-C Asselain Tome 2 Empty Re: Histoire économique de la France. de J-C Asselain Tome 2

Message  Cyprien Mer 31 Déc - 15:08

II/ L'enlisement dans la dépression (1930-1935):
Les années 1930 se présentent donc comme une nouvelle phase de déséquilibre permanent: déficit budgétaire, baisse générale des prix, chutes des perspectives de profit, arrêt des investissements, baisse de la production, des revenus et de la demande,... L'économie française connaît non seulement une baisse absolue de la production et de l'activité économique, mais aussi, au fil des années, une détérioration relative par rapport aux autres pays. Sentiment d'impuissance et d'exaspération. Ce qui est sans doute le plus surprenant, c'est l'incapacité des dirigeants français à tirer les enseignement des expériences étrangères. Attachement inconditionnel à la stabilité monétaire.
1)L'entrée dans la dépression:
L'économie française entre avec retard dans la dépression ou du moins par étapes. Elle subit passivement les effets de plusieurs chocs extérieurs successifs. Le premier, le "Vendredi noir" de Wall Street est passé presque inaperçu. La France, au début de 1930, apparaît comme un îlot de prospérité. Vif sentiment de supériorité, le franc apparaît plus solide que jamais. Pourtant les mécanismes internationaux de transmission de la crise commencent déjà à jouer: contrecoup du moratoire Hoover,... La dépression, cependant s'installe "en douceur". Le seul secteur réellement atteint est le commerce extérieur. Tout change brusquement en septembre 1931, c'est alors le premier point tournant de la crise: la dévaluation de la livre. La chute de la livre relance la crise dans les pays non dévaluateurs, comme les Etats-Unis et la France. Déficit commercial permanent (cf image d'A.Sauvy), baisse de la production industrielle, chômage,... Mécanismes cumulatifs internes de contraction: le plus puissant est la chute des investissements. L'agriculture est en très mauvaise posture; baisse des cours qui se répercute sur l'activité économique générale. La reprise amorcée au début de 1933 est brisée par la dévaluation du dollar en avril 1933. Rechute commune du "Bloc-or": France, Pays-Bas, Belgique, Suisse et Italie.
2)L'inefficacité des politiques:
Parler de politique face à la crise est presque un abus de langage. En fait, les gouvernements successifs se sentent désarmés. Jusqu'à la politique de déflation de 1935, ensemble de mesures de circonstances visant plus à agir sur les effets que sur les causes de la crise.
a) L'obsession de l'équilibre budgétaire: Situation de déficit budgétaire permanent. Le déficit n'est pas la cause mais la conséquence de la crise. L'élimination du déficit en période de dépression non seulement n'est pas possible, mais n'est pas souhaitable (cf "révolution keynésienne"). Mais à l'époque, le dogme de l'équilibre budgétaire continue à dominer les esprits. Le terme d' "assainissement" revient constamment, cependant l' "assainissement" en question ne sera jamais réalisé. cf les différentes mesures. L'enjeu de ces luttes est presque dérisoire par rapport au montant réel du déficit: les comptes définitifs pour 1934 révéleront un déficit de 12 milliards. Si finalement le problème du déficit budgétaire compromet la reprise, c'est plutôt à travers ses répercussions politiques...
b) Les mesures malthusiennes: Le terme de "malthusianisme économique" est couramment employé pour désigner l'ensemble des mesures qui visent à rétablir l'équilibre des marchés à travers une restriction de l'offre. Les réflexes "malthusiens" sont en contradiction flagrante avec le credo libéral, qui persiste à d'autres égards. Les principales mesures concernent l'agriculture: politique du blé, prix minimum, encouragement au stockage et à la dénaturation,etc. L'inefficacité est manifeste: il n'y a pas d'impact sensible sur la production et les prix continuent à baisser. En dehors de l'agriculture, attitude de plus en plus compréhensive à l'égard des ententes professionnelles. Il faut mettre à part deux mesures, dont la portée est inégale, mais qui témoignent de la portée internationale de la crise: la première est la loi d'août 1932 "protégeant la main d'oeuvre nationale", la seconde est la loi de mars 1936 concernant l'industrie de la chaussure (/ la firme tchécoslovaque Bata).
c)Les mesures protectionnistes et le refus de dévaluer: Déficit commercial permanent. Renforcement du protectionnisme à partir de l'été 1931: "surtaxe de change", contingentements,... La protection du marché français a sans doute retardé la baisses des prix. Cloisonnement de l'économie mondiale. Néanmoins, la chute des exportations françaises résulte aussi d'un facteur aggravant qui ne joue que pour les pays du Bloc-or: l'écart des niveaux des prix entre les différents pays. En novembre 1935, le Bloc-or lui-même commence à s'effriter avec la dévaluation belge. En France, à quelques exceptions près (Reynaud, Blum), la dévaluation reste considérée comme l' "abomination de la désolation". Le problème commence à être posé lorsque le mouvement spéculatif des capitaux se retourne contre le franc (1934-35).
d) La politique de déflation du gouvernement Laval (juin 1935- janvier 1936): Il s'agit là sans doute du premier effort relativement cohérent pour trouver une solution d'ensemble à la crise, en même temps que d'une sorte de tentative de dernière chance pour échapper à la dévaluation. Le gouvernement obtient des "pouvoirs exceptionnels pour assurer la défense du franc et la lutte contre la spéculation". Deux grands volets: la "déflation budgétaire" (plus brutale que les précédentes), et des mesures plus originales de "déflation économique". On escomptait une baisse des prix et des revenus nominaux, mais un coût économique très lourd. Or, les résultats ont été doublement déconcertants: légère reprise économique, et redressement des prix paradoxale à partir de l'été 1935... Mais la reprise est très insuffisante. La principale conséquence de la déflation est une conséquence politique: la victoire du Front Populaire aux élections de mai 1936.
3)Premier bilan de la dépression vers 1935:
a) Baisse de l'activité et distorsions structurelles: La question essentielle est celle du recul de la production. En ce qui concerne la productivité, la crise a eu des effets variables selon les branches. Dans l'ensemble le recul de la production correspond bien plus à un recul de l'activité qu'à une baisse de la productivité. Le recul de l'emploi est bien plus ample que l'accroissement du chômage. Le secteur tertiaire joue plus ou moins le rôle de "secteur refuge". La dépression a freiné l'exode rural et la diminution de l'emploi agricole. Le recul le plus spectaculaire est celui du commerce extérieur. Le contraste plus général entre le "secteur abrité" et le "secteur exposé" ou "ravagé".
b) La résistance générale des niveaux de consommation: A première vue, une surprise: il n'y a eu pratiquement aucune baisse des niveaux moyens de consommation. La répartition du revenu national entre investissements et consommation a été considérablement modifiée: l'investissement s'est, à proprement parler, effondré. Autrement dit, le maintien de la consommation a été assuré essentiellement aux détriment des possibilités de croissance future.
c) Les inégalité devant la crise: Ce sont les revenus des exploitants agricoles qui ont subi l'amputation maximum. La masse des salaires et retraites, au contraire, n'a que faiblement diminué. Inégalités selon les branches. Inégalités liées aux conditions d'emploi: chômage total, partiel,... Les revenus de la propriété et de l'entreprise évoluent aussi de façon très variable: baisse des profits, très forte diminution des "bénéfices industriels et commerciaux", mais la dépression revalorise le capital placé en obligations et titres à revenu fixe par rapport au capital-actions, c'est la "revanche du rentier". L'économie française vers 1935-1936 est "plus une économie en dérive qu'une économie en détresse" (Alfred Sauvy). Les catégories "passives" (retraités, rentiers) sont presque les seules bénéficiaires, toutes les autres souffrent de l'insécurité, sous ses formes multiples: mévente agricole, menace de la faillite et du chômage.

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Message  Cyprien Mer 31 Déc - 15:09

III/ Des réformes du Front populaire à la Seconde Guerre mondiale:
Période brève de deux ans. La phase ascendante du Front Populaire prend fin avec la "pause" du printemps 1937. Immobilisme relatif des gouvernements à direction radicale. L'échec de la grève générale de novembre 1938 est largement ressentie comme la revanche de juin 1936. La voie est alors libre pour la politique de Paul Reynaud. Deux reprises précaires, en 1937 puis au printemps 1939, encadrent une rechute profonde en 1938.
1)Le programme du Rassemblement Populaire:
Divergences entre les trois partis, d'où de sérieuses ambiguïtés dans le programme. L'axe du programme, c'est la "politique du pouvoir d'achat", l'antithèse de la déflation. Il s'agit, explique Léon Blum, d'inverser l'ordre des priorités entre le financier, l'économique et le social. Mesures concrètes: création d'un fonds national de chômage, plan de grands travaux, création de l'ONIB, la semaine de 40h avec maintien du salaire hebdomadaire,... Les dangers de l'application des 40 heures sont très mal perçus. Programme de relance qui ne fait qu'une place assez modeste aux réformes de structure (...)."Ni déflation ni dévaluation!" Ce refus est en un sens surprenant. En excluant a priori la dévaluation, le Front Populaire fait donc un pari difficile à tenir: ni contrôle des prix, ni contrôle des changes, la politique de reflation risque donc d'avoir pour résultat essentiel un accroissement démesuré des importations: "on ne saurait regonfler un pneu percé" (A.Sauvy).
2)L'économie française sous le gouvernement Blum (juin 1936- juin 1937):
a) L'application du programme de 1936: L'imprévu, c'est d'abord le déferlement sans précédent de grèves avec occupation d'usines, aux mois de mai-juin 1936. cf Accords Matignon, les 3 réformes du 11 et 12 juin 1936, etc. La dévaluation de septembre 1936 allait introduire un second imprévu: elle a été finalement appliquée (sinon "décidée") le 26 septembre 1936, dans le cadre d'un accord monétaire international avec la Grande-Bretagne et les Etats-Unis. Le franc est dévalué d'environ 30%. Dès lors, la grande affaire devient la semaine de 40 heures, votée en juin 1936.Trois problèmes: le premier est celui du rythme d'application (échelonnée de novembre 1936 à juin 1937), le second terrain d'affrontement est la question des dérogations et des possibilités d'heures supplémentaires, la troisième question, au contraire, celle de la répartition des 40 heures de travil à travers la semaine, s'est réglée avec une facilité déconcertante (la formule de la "semaine de cinq jours" se généralise). Répercussions psychologiques: "mystique de la paresse", climat passionnel,...
b) Les résultats économiques du Front Populaire: Les catastrophes annoncées n'ont pas eu lieu. Il n'y a eu ni multiplication des faillites, ni recul de la production, ni aggravation du chômage. Le nombre d'emplois supplémentaires a été supérieur à la diminution du chômage; en fait, le chômage de 1936 est un chômage en grande partie de nature "résiduelle". En ce qui concerne la production, il s'est produit une incontestable reprise. A quoi est due la reprise? La dévaluation, la politique du pouvoir d'achat, la reprise mondiale. A quoi est due son interruption prématurée? Evasion des capitaux, alourdissement des charges des entreprises, le retour d'une conjoncture inflationniste (même si loin d'être entièrement défavorable...) car: "course des salaires et des prix", accroît le déficit budgétaire, tend à annuler les effets positifs de la dévaluation. Le facteur direct de la limitation de la production est en fait la semaine de 40 heures.Toutes les possibilités de reprise reposaient donc sur un accroissement des rendements (ou de la productivité), ce qui exige du temps. L'élasticité de la production s'est révélée insuffisante dans trois industries clefs: les mines, la métallurgie, le travail des métaux. La réforme pouvait certainement être assimilée à moyen terme, mais les circonstances historiques ne l'ont pas permis: raisons de politique intérieure, rechute économique mondiale de 1938, et imminence de la guerre.
3) De la fin du Front Populaire à la guerre de 1939:
a) La récession de 1938: Ministère Chautemps. Les socialistes s'opposent à toute remise en cause des 40 heures (symbole...). Quelques mesures de faible portée contre le déficit budgétaire, nationalisation des chemins de fer (crétion de la SNCF),... Le seul fait marquant est sans doute la nouvelle dévaluation du franc, à l'été 1937, qui consacre l'échec de la dévaluation de septembre 1936. La seconde dévaluation a eu pour effet de donner un "coup de fouet" immédiat à l'économie française, mais , à l'automne 1937, la reprise vient buter sur le même obstacle invisible: la capacité de production maximum réalisable dans certaines branches sous le régime des 40 heures. Nouvelle dépression de l'économie mondiale, chômage, impasse économique.
b) L'ultime tentative de redressement: Dernier sursaut qui a avant tout une signification politique: climat de "mauvaise conscience après Munich, le gouvernement éprouve le besoin de "faire quelque chose". Le 1er novembre, Paul Reynaud est nommé ministre des finances: décrets-lois, mesures énergiques d' "aménagement" des 40 heures. L'épreuve de force est alors inévitable. La CGT appelle à la grève générale pour le 30 novembre. C'est un échec, et le gouvernement prend de lourdes sanctions. Retour des capitaux, bientôt la semaine des 40 heures n'est plus qu'un souvenir (...). Une indiscutable reprise se dessine au cours du 1er semestre de 1939, dans des conditions typiquement "keynésiennes", ce redressement étant lié au réarmement. C'est la production d'armements qui devient, de plus en plus à l'approche de la guerre, le critère par excellence de l'activité économique. cf comparaisons / Allemagne...

IV/ Le déclin économique français à la veille de la seconde guerre mondiale:
En fait, ce qui fait l'unité de cette période, c'est l'instabilité chronique. On se heurte à une difficulté: 1913 pouvait être considérée comme une année "normale", mais pas 1938; l'imminence de la guerre est bien plus fortement perçue en 1938 qu'en 1913, et il s'agit de toute façon d'une année de récession mondiale sévère.
1) Tra,sformations de structures et ralentissement global:
a)L'évolution des strucures sectorielles: La France de 1938 ne ressemble pas à celle de1913. Elle est restée le plus agricole des grands pays occidentaux mais soncaractère rural et paysan s'est malgré tout sensiblement atténué. Tendance de longue période à la concentration de la production agricole sur les meilleures terres. Recul des cultures céréalières au profit des cultures fourragères. Les strucures du secteur industriel ont été également évolué. Le seul fait indiscutable est le recul de la toute petite entreprise artisanale oou quasi artisanale. Inversement, les établissements de plus de 100 salariés regroupent environ la moitié des salariés de l'industrie de 1936. La part des établissements de dimension médiocre témoigne d'une grande stabilité. Problèmees d'appréciation de la concentration. Automobile: début de l'ère de la fabrication en série, la concentration progresse ici par croissance interne plutôt que par fusions. Industrie chimique:les fusions y jouent un rôle essentiel. Trois groupes d'industries: le textile-habillement (régression impressionnante), un groupe d'industries très dynamiques (charbon, pétrole, industries chimique et pharmaceutique,...), le troisième groupe, enfin, correspond à des industries en croissance rapide jusqu'en 1929, mais fortement atteintes par la dépression (construction, industries métallurgiques et mécaniques surtout, etc.). Croissance à peu près continue et générale des activités tertiairesLe fait le plus marquantest que la part de l'industrie dans l'emploi total rest retombée en 1938 au-dessous de la proportion de 1913.
b)Production, emploi, productivité: L'évolution de la production peut être considérée comme le produit de deux composantes: l'emploi et la productivité. Un fait est certain: en 1938, ni la production industrielle ni le revenu national n'ont retrouvé leur niveau de 1929. Décélération très marquée de la croissance industrielle; le rythme de croissance de la production agricole, quant à lui, hute d'un peu plus de moitié. Période anormale? Sans doute, puisqu'elle englobe à la fois une longue guerre et une longue dépression mais le ralentissement à long terme doit être imputé essentiellement à la dépression. En ce qui concerne l'emploi, ce n'est pas d'un ralentissement de la croissance qu'il s'agit, mais d'une diminution absolue. Il n'y a pas eu le moindre ralentissement des gais deproductivité.Explications: la réduction du temps de travail, l'élimination des très petites entreprises, la mécanisation, investissements "de rationalisation" (> "de capacité").
c) Fortunes et revenus: Les politiques économiques des années 1930 ont eu successivement comme principal objectif de "sauver la monnaie" (politiques déflationnistes), puis, avec le Front Populaire, d'accroître le pouvoir d'achat ouvrier. Double échec. Sur l'ensemble de la période, cependant, l'évolution apparaît nattement plus défavorable pour les fortunes que pour les revenus. La thésaurisation en or se révèle en fin de compte le seul "placement" avantageux (...). Au total, la valeur moyenne des successions déclarées a diminué de moitié en francs constants entre 1913 et 1938 (max = 1929). L'importance de l'amputation réelle des patrimoines ne fait aucun doute. La composition des fortunes s'est modifiée: la part des biens fonciers a diminué, celle des immeubles de rapport bienplus encore; la part des valeurs mobilières françaises s'est accrue, alors que le portefeuille de valeurs étrangères n'a jamais retrouvé son importance d'avant 1914. Le revenu réel par habitant, au contraire, a progressé entre 1913 et 1938 d'environ 1/4. Le partage du revenu a évolué, au moins à première vue, dans un sen favorable aux salariés (...). Le bilan à long terme paraît favorable pour les ouvriers. Dans l'ensemble, on est frappé par la rigidité des structures de répartition. Le fait marquant est l'accroissement de la part de la consommation au détriment de l'investissement.
2)Les facteurs d'affaiblissement durable:
a) Le vieillissement démographique: La population totale de la France a complètement stagné entre 1913 et 1938. Le mouvement naturel peut s'analyser comme la résultante de deux tendances de longue période: la baisse de la mortalité et la baisse de la natalité (...). Mais la spécificité de la démographie française est que le mouvement de dénatalité y est beaucoup plus ancien. Deux conséquences: la réapparition des excédents de décès sur les naissances à partir de 1935, et la modification de la structure par âge de la population.
b) Repli et fermeture de l'économie française: La crise de 1929 marque une rupture profonde, elle amorce unmécanisme cumulatif de contraction: les "taux d'ouverture" sont les plus faibles jamais enregistrés depuis le milieu du XIXè siècle. Cloisonnement mondial, et faiblesses spécifiques de la France: la plupart des exportations traditionnelles sont gravement atteintes. Soldes commerciaux brutalement fluctuants (1920's # 1930's). Ce déclin -absolu et relatif- de la position mondiale de l'économie française contribue à expliquer son "repli" sur l'Empire colonial. Dépendance énegétique ancienne, et dépendance alimentaire de la France.
c) Recul du marché, alourdissement des charges, passivité de l'Etat: L'entre-deux-guerres se caractérise par un nouveau recul de l'influence du marché (...). Mise en place des assurances sociales à partir de 1930 et des allocations familiales à partir de 1932. , etc. Le poids de l'etat dans l'économie nationale s'est fortement accru par rapport à l'avant-guerre, surtout au cours des années 1930. La notion même de redistribution sociale des revenus n'a pas encore réellement percé. Aucun plan d'ensemble cohérent. L'Etat n'a toujours ni les moyens ni la volonté de mener une véritable politique économique.
A titre de conclusion provisoire, nous admettrons que la "cassure" initiale des exportations, le refus obstiné de dévaluer jusqu'en septembre 1936, avec leurs conséquences cumulatives, et, bien sûr, la dislocation du commerce mondial sous l'effet d'un protectionnisme de type nouveau epliquent pour une large part le "Sedan économique" des années 1930.

Cyprien
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Histoire économique de la France. de J-C Asselain Tome 2 Empty Le nouveau départ de l'économie française après 1945 (3):

Message  Cyprien Mer 31 Déc - 15:10

Le nouveau départ de l'économie française après 1945 (3):

Introduction: Deux points tournants: 1958 et 1973. Le fait nouveau essentiel, c'est l'accélération de la croissance aussi bien par comparaison avec l'entre-deux-guerres que dans une perspective de très long terme. La régularité de la croissance apparaît comme un facteur essentiel de l'accélération de longue période. L'augmentation de la production correspond presque entièrement à des gains de productivité (population active stagnante... 1965 = 1913). La France se situe indiscutablement dans le groupe des pays à croissance rapide; la croissance économique française tend à s'accélérer en cours de période, et à dépasser légèrement celle de l'Allemagne à partir des années 1960: croissance forte et régulière. 1958 revêt d'abord une signification politique., ctte date correspond aussi à un point tournant de la conjoncture mondiale: la récession de 1958 est l'une des plus sévères de l'après-guerre, et c'est aussi la dernière récession marquée avant 1973. Enfin, le Marché commun entre officiellement en vigueur le 1er janvier 1959. Le choix de 1973-1974 comme point de départ de la dernière sous-période n'exige pas de longues justifications... Coup d'arrêt brutal à la croissance industrielle, brisant net l'accélération des années 1968-1973.

I/ De la reconstruction à la croissance soutenue (1945-1958):
Le relèvement économiquue français s'explique par des causes d'ordre extérieur et intérieur.Les crédits du Plan Marshall, la réorganisation du système monétaire international sous l'égide du dollar, le décloisonnement progressif de l'économie mondiale ont certainement joué un rôle important. Cependant, le développement de la production en France durant cette période reste axé, à titre principal, sur le marché intérieur. Les réformes de srtucture de la Libération ont considérablement accru les responsabilités du gouvernement dans le domaine économique. Les nationalisations et le Plan.
1) Les bases du redressement:
a) Les priorités de la reconstruction: cf le bilan de la guerre de 1939-45 / celle de 1914-18. Au total, les dommages peuvent être évalués à plus du quart de la fortune nationale. "Bataille de la production", etc. Le principe des 40 heures est rétabli par une loi de février 1946, mais son application effective est subordonnée sans aucune équivoque aux nécessités de la reconstruction. Retournement remarquable: la durée du travail est désormais plus élevée en France qu'à l'étranger. Cet effort de travail devait s'accompagner d'un effort d'investissement qui ne pouvait avoir lieu que sous l'impulsion et le contrôle de l'Etat. Esprit anticapitaliste de cette période. Trois grands axes se dégégent clairement: la priorité aux secteurs de base, l'importance cruciale des investissements, la nécessité pour l'Etat de prendre en main les "leviers de commande" (à commencer par les crédits) en vue de contrôler et d'orienter les investissements.
b) Les réformes de structure: les nationalisations et le Plan: Les nationalisations tiennent une place centrale dans le programme du CNR, adopté en mars 1944, et qui sert de charte commune aux trois partis associés au gouvernement De Gaulle à la Libération. En fait, le processus s'est déroulé en deux temps. D'abord, au lendemain de la Libération, se situe la phase de nationalisations "spotanées" de l'automne 1944, réalisées sous la pression directe des travailleurs et consacrées par ordonnance: Renault et les Charbonnages du Nord. La secinde phase est celle des "nationalisations légales", votées par l'Assemblée constituante avant et après le départ du GDG (décembre 1945 à mai 1946): crédit et assurances, gaz et électricité, ensemble des houillères,... L'ensemble n'est pas pleinement cohérent les banques d'affaires et la sidérurgie échappent à la nationalisation,... Elles ont été pour le gouvernement un instrument de modernisation rapide des secteurs de base. Commissariat Général au Plan créé en 1946 sous la direction de Jean Monnet. Le premier "Plan de modernisation et d'équipement" a été adopté en janvier 1947 pour la période 1945-1950. En même temps, se développe l' "économie de concertation". Naissance de la Sécurité Sociale avec l'ordonnance de 1945 puis la loi de mai 1946. Majoration du taux des allocations familiales.
c) Le renouveau démographique: La Seconde Guerre mondiale marque un tournant de l'histoire démographique: le redressement de la natalité a été plus précoce (il s'amorce dès 1942), bien plus ample et durable qu'en 1919. cf chiffres, etc. La classe d'âge intermédiaire se trouve donc "comprimée" entre les deux extrèmes. D'autres facteurs contribuent à la diminution dans la population du taux d'activité: l'abaissement de l'âge de la retraite, l'allongement du taux de scolarité, et surtout l'étonnante diminution du taux d'activité féminin jusqu'au minimum de 1962 (<1901!). Le recul du taux d'activité général a été compensé par le maintien d'une durée du travail plus élévée que partout ailleurs en Europe, par une reprise de l'immigration et surtout par l'ampleur des gains de productivité. Principales causes du redressement économique: l'expansion démographique, le rôle joué par le Plan, le climat général de confiance (anticipations de croissance), les nationalisations (effort d'investissement, amorçage de la pompe...).
3) Les étapes du relèvement:
a)Le succès de la reconstruction: Le succès de la reconstruction, c'est d'abord le relèvement de la production. Cf chiffres, etc. Le goulet d'étranglement énergétique s'est trouvé progressivement desserré. (...) L'un des faits majeurs de l'après-guerre est le retard du relèvement du pouvoir d'achat des salariés par rapport au rétablissement de la production. La hausse des prix résulte d'abord des pénuries alimentaires. Les salariés sont encore une fois perdants dans l'immédiat, mais le retour à une certaine "vérité des prix" permet l'abolition, en 1949, du rationnement des biens de consommation, sans provoquer de déséquilibre ni relancer la hausse des prix. SMIG en 1950. Le rétablissement des équilibres extérieurs, facilité à partir de 1948 par l'aide américaine, semble aussi en voie de réalisation vers la même date. Dévaluations de 1948 et 1949. Le bilan de cette période se caractérise donc à la fois par le redressement de la production et par le rétablissement des équilibres.
b) La croissance des années 1950: Période de croissance ininterrompue. Les années 1950 représentent un tournant dans l'histoire de l'agriculture française, qui devient en quelques années un des points forts de l'économie. L'agriculture contribue indirectement à la croissance des autres secteurs, en libérant de la main d'oeuvre à un rythme jamais atteint par le passé. Le poids relatif des différentes branches industrielles continue également à se modifier. Dynamisme de la siderurgie: la CECA. Un autre secteur qui se trouve désormais entraîné dans la croissance est la construction de logements (une des priorités du IIè Plan). De façon générale, l'effort d'investissement s'est poursuivi sur sa lancée des années d'après-guerre. Ce sont les investissements du secteur privé, encouragés par les aides publiques, qui tendent de plus en plus à prendre la relève.
b) Limites et fragilité du redressement: en termes purement quantitatifs, d'abord, la croissance française, comparée à celle des autres grands pays européens apparaît seulement honorable. Autre signe inquiétant: la croissance française d'acier n'a pas suivi celle de l'extraction de minerai de fer en France. La production reste orientée vers le marché interne. Deux déséquilibres de la croissance des années 1950 étroitement associés: la hausse inflationniste des prix, et le déficit extérieur. L'inflation de 1951 est une inflation mondiale, provoquée pâr la guerre de Corée, et qui correspond à une hausse particulièrement brutale du cours des matières premières. Puis expérience Pinay (...). Le nouvel élan de l'inflation à partir de 1956-1957 est beaucoup plus grave, d'abord parce qu'il s'agit cette fois d'une inflation purement française (guerre d'Algérie...), et , de plus, les gouvernements français ont renoncé à agir sur l'inflation donnant priorité au maintien de la croissance. Discrédit de la IVè République: manipulations de l'indice des prix, déficit extérieur, crise financière,... L'opinion est plus sensible aux déséquilibres qu'à la croissance. Le Traité de Rome pouvait d'autre part apparaître risqué dans les conditions du moment...

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Message  Cyprien Mer 31 Déc - 15:10

II/ L'économie dans le Marché commun: l'essor de années 1958-1973:
Introduction: Les dévaluations ont souvent coïncidé en France, depuis un demi-siècle, avec les grandes dates de l'histoire politique: c'est le cas en 1936, en 1958, en 1969, en 1981. La dévaluation de 1958 s'inscrit donc dans une longue lignée; elle était inévitable, et assez modérée. Tournant majeur; redressement financier très frappant dès 1959. La dévaluation de 1958 peut être considérée comme le prélude à l'entrée de l'économie française dans le Marché commun des "Six". La mise en place du Marché commun domine en effet l'évolution économique des années 1960. Il s'agit d'un choix économique fondamental hérité de la IVème République. L'ouverture extérieure devient pour l'économie française à la fois un des principaux moteurs de la croissance, et une source de contraintes nouvelles.
1) Les impulsions nouvelles:
a) L'ouverture extérieure: Les objectifs économiques du Marché commun correspondent aux objectifs généraux de toute politique de libre-échange (...). Confiance retrouvée dans la capacité concurrentielle de l'industrie française. On prévoit, d'une part, une accélération de la libération des échanges, et, d'autre part, la réduction progressive des droits de douane sur les échanges mutuels. L'instauration du libre-échange "interne" ne devait nullement s'accompagner d'un protectionnisme renforcé à l'égard du reste du monde. "Tarif extérieur commun". 1er janvier 1959 = la première réduction des droits de douane sur les échanges mutuels, puis les étapes suivantes sont franchies plus rapidement que prévues (la dernière = le 1er juillet 1968). Simultanément, la "P.A.C" se met en place en vertu d'un accord très difficilement acquis en 1962. La formation du Marché commun a eu pour effet immédiat une accélération remarquable des échanges extérieurs des six pays. Véritable réorientation géographique. Le marché français est de plus en plus intensément pénétré. La "contrainte extérieure" devient dès lors la donnée cruciale autour de laquelle s'organise la politique économique française. Fin 1958, commission dirigée par J.Rueff et L.Armand pour dresser le bilan des "rigidités". Vème Plan placé sous le signe de la "compétitivité de l'industrie française". Nouvelle approche de la planification: le nouveau modèle "physico-financier" (baptisé FIFI) représente un pas décisif vers une planification en valeur. L'objectif essentiel de la politique du gouvernement consiste à faciliter la "création ou le développement de groupes à capitaux français de taille internationale".
b) L'accélération des investissements: Accélération des années 1960. L'économie française tend à rejoindre le groupe des pays à taux d'investissement très élevé. Facteur direct d'accroissement quantitatif des capacités de production, mais en même temps il contribue aussi à la croissance à travers le progrès technologique dont il est le support. Forte progression des dépenses de recherche. L'Etat cherche avant tout à encourager les investissements privés. Politique d'ensemble qui tend à réduire le poids économique de l'Etat (d'abord fortement contrariée par le développement des guerres coloniales). La réduction relative de près de moitié des impôts liés à la production a permis de compenser l'accroissement des charges salariales. Encouragements directs en faveur de l'épargne privée et des investissements privés. Les années 1960 se caractérisent à la fois par une accentuation des inégalités de revenu (jusqu'en 1965-1967) et par un développement notable de l'épargne des ménages (le taux d'épargne croît: une partie de cette épargne sert à financer la construction de logements, une autre vient se placer sur le marché financier). Les émissions de valeurs mobilières (actions et obligations) retrouvent à côté de l'autofinancement une part plus importante dans le financement des investissements. Ces deux sources, cependant, ne suffisent pas. L'essor des investissements au cours des années 1960 est également fondé sur un accroissement de l'endettement bancaire à court, moyen et long terme (facteur de vulnérabilité et de dépendance pour les firmes) et sur un flux important d'investissements étrangers en France (facteur nouveau de dépendance extérieure pour l'économie française). Dépendance énergétique aussi.
c) Le coût décroissant de l'énergie: L'économie française bénéficie durant toute cette période d'une diminution impressionnante et continue du prix réel de l'énergie: surtout en ce qui concerne le pétrole en raison du coût décroissant d'extraction et d'une situation du marché mondial défavorable au pays producteurs. Baisse du coût de la thermie. Deux conséquences capitales: un accroissement exceptionnellement rapide de la consommation d'énergie, qui a doublé entre 1960 et 1973; et une tendance irrésistible à l'accroissement de la part du pétrole dans le total de l'énergie primaire consommée. Répartition de la consommation d'énergie (en %): charbon: 74 (1950), 17.5 (1973); Pétrole et gaz naturel: 18 (1950), 74.5 (1973). Le risque de dépendance extérieure semble avoir été délibérément accepté. "Plan Jeanneney" (1959) prévoyant la fermeture des mines les plus déficitaires. la seule source nouvelle importante d'énergie "nationale" est le gisement de Lacq, exploité à partir de 1957. Quant à l'électricité nucléaire, l'exécution du programme est ralentie dans les années 1960; sa rentabilité apparaît problématique compte tenu de la baisse du prix du pétrole. Le taux de dépendance énergétique de la France passe de 41% en 1960 à 76% en 1973. La stabilité des prix de l'essence contribue au triomphe de l'automobile. La répartition du trafic-marchandises évolue de façon irréversible au profit de la route.
2) Le comportement de l'économie française jusqu'en 1973:
a) Croissance et équilibre extérieur: La période 1958-1973 est celle qui a connu la croissance la plus rapide de l'histoire de l'économie française. Des observateurs attentifs annoncent à l'étranger "l'envol économique de la France dans les années 1980". Une telle performance est d'autant plus significative que les équilibres financiers n'ont pas été, à proprement parler, sacrifiés à la croissance. Deux "coups de frein" de politique monétaire et budgétaire sont intervenus en 1958-1959, puis en 1963-1965 (plan de stabilisation de VGE). Les exportations ont constitué l'un des principaux moteurs de la croissance (surtout pour l'agriculture, les industries agricoles et alimentaires, les industries de biens d'équipement). Les échanges de produits industriels ont fortement accusé les effets de l'ouverture des marchés européens: hausse de leur part dans les importations. Circonstances exceptionnelles de cette période: risque d'être surclassée par ses partenaires au moment même où elle perd les "facilités" des débouchés coloniaux garantis. Cette phase critique a été, en fin de compte, traversée avec succès. La France enregistre régulièrement (sauf en 1964, 1968-1969) un triple excédent: de la balance commerciale, de celle des des paiements courants, et pour les mouvements de capitaux à long terme. Au niveau européen, l'écart des taux d'inflation au cours des années 1960 est assez faible, même par rapport à l'Allemagne; l'inflation a eu plutôt tendance à se ralentir jusqu'au milieu des années 1960 et ne s'accélère vraiment que vers 1970; cette accélération a été relativement modérée en France. C'est pourquoi le taux dévaluation de 1969 a pu être sensiblement plus faible (11%) que celui de toutes les dévaluations antérieures. Cette dévaluation de faible amplitude a suffi à redonner un avantage durable aux exportations françaises jusqu'au début des années 1970. Rôle encore plus "moteur" des exportations. La dévaluation de 1969 pourrait être considérée à la limité comme un "accident", provoqué par les hausses de salaires exceptionnelles de 1968 et par les sorties de capitaux des mois suivants. Accident favorable du reste. Mais la crise de 1968 revêt une signification historique.
b) Les transformations structurelles: L'agriculture reste le secteur dont l'évolution apparaît la plus saisissante. Poussée des exportations françaises par l'instauration du Marché commun agricole. Modernisation, gains de productivité, diminution de la population active agricole accélérée, migrations du secteur agricole vers le reste de l'économie, diminution du nombre d'exploitations, augmentation de leur taille moyenne, endettement accéléré, "industrialisation de l'agriculture",... Dans l'industrie, le fait majeur est le processus de concentration, directement lié à la construction européenne. Concentration financière plus que technique. Brusque élan aux investissements étrangers et aux prises de participation dans l'industrie française (exemple des IAA). Les industries chimiques (étudiées par F.Caron) sont particulièrement dynamiques; trois grands groupes dominants, atteignant chacun une "dimension internationale": Pechinay-Ugine-Kuhlmann, Rhône-Poulenc et Saint-Gobain-Pont-à-Mousson. Concentration aussi dans les branches en perte de vitesse: textile (hécatombe d'entreprises familiales), la sidérurgie (détérioration brutale de la situation dans les années 1960; trois grands groupes dominants: Wendel Sidelor, Denain Nord-Est Longwy, et Creusot-Loire. "Grands programmes" de recherche et toute sorte d'appuis de l'Etat: industrie électronique, aéronautique,... Les restructurations ont contribué à freiner la progression de l'emploi industriel, alors même que la production et les investissements industriels conservent tout leur élan. Le secteur tertiaire est donc le seul à augmenter proportionnellement, et le gonflement des effectifs du tertiaire ne fera que s'accentuer avec la crise, après 1974.
c) Les frustrations de la croissance: Très réelle insatisfaction sociale dont l'explosion de 1968 a été le révélateur. Malaise, réapparition du chômage (sa montée est à peu près continue à partir de 1965). Le chômage des années 1960 peut être considéré comme essentiellement démographique. Les créations d'emploi atteignent du reste un rythme particulièrement élevé jusque vers le début des années 1970. Il s'agit surtout d'un problème de désadaptation et de rigidité. La croissance n'empêche pas non plus certains secteurs en déclin structurel de longue période, ou perdants dans la compétition internationale, de connaître des problèmes aigus: industries textiles, charbonnages, mines de fer et sidérurgie lorraine. Beaucoup de petites exploitations agricoles sont menacées. Les inégalités de revenu ont eu tendance à s'accentuer au cours de la croissance. Retard cumulatif du SMIG sur la progression générale des salaires; malgré le rattrapage exceptionnel de 1968 (accords de Grenelle) suivi de l'instauration du SMIC, la parité de 1958 n'est toujours pas retrouvée en 1973. Quant à la croissance explosive des effectifs scolaires et universitaires, elle ne suffit pas à garantir pour l'avenir une mobilité sociale accrue. Jamais la croissance économique n'a eu aussi mauvaise réputation qu'au début des années 1970 (cf. le succès de l'idée de "croissance zéro") au moment même où le rythme de la croissance va être brutalement rompu sous l'effet du premier choc pétrolier.

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Message  Cyprien Mer 31 Déc - 15:11

III/ La rupture des années 1970: crise ou nouveau régime de croissance?
La plupart des explications de la crise ont en commun de considérer le quadruplement du prix du pétrole, intervenu à l'automne 1973, comme un simple catalyseur, ou mieux comme le simple révélateur d'une crise préexistante. Certains auteurs (J.H.Lorenzi, O.Pastré et J.Toledano) critiquent ainsi les analyses "superficielles" qui font partir la crise de 1973-1974...
1) Singularité de la "crise" des années 1970:
Les crises du passé avaient en commun quatre caractéristiques: 1) la chute brutale des prix de gros. 2) un recul non moins brutal de la production dans tous les secteurs, suivi d'une stagnation prolongée. 3) L'effondrement des investissements. 4)La crise signifie l'augmentation brusque du nombre de faillites, la diminution de l'emploi et surtout l'aggravation du chômage. Qu'en est-il de la crise des années 1970? En ce qui concerne le mouvement des prix, l'opposition est flagrante: pour la première fois, crise économique devient synonyme d'inflation; c'est une inflation rapide et qui prend un caractère permanent. En ce qui concerne le mouvement de la production, , l'économie française a été atteinte avec un certain retard. En revanche, on ne saurait trop insister sur le contraste en ce qui concerne l'amplitude du recul de la production. Le "fond de la dépression", si l'on peut dire est atteint en 1975; le "maximum d'avant-crise" est retrouvé tout juste 2 ans plus tard, au 3ème trimestre 1976. Autrement dit, alors que la dépression se caractérisait par une diminution absolue de la production sur plusieurs années, la rupture des années 1970 désigne un simple ralentissement du rythme de croissance du PIB. La consommation des ménages paraît encore bien moins affectée. Si la consommation augmente désormais plus vite que le PIB, il est clair que l'investissement doit avoir accusé bien plus fortement les effets de la rupture de 1973-1974. On ne doit pas identifier la rupture des années 1970 aux crises du passé: d'abord parce qu'il y a eu stabilisation; le taux d'investissement s'est trouvé simplement ramené à son record de 25% en 1974 à 21-22% en 1979; la croissance du capital directement productif reste rapide; le montant du capital par travailleur aurait continué de croître à un rythme inchangé;... Tout ceci explique que la productivité du travail ait continué à progresser à un rythme tout au plus légèrement ralenti. C'est précisément la discordance entre le très net ralentissement de la croissance de la production et le maintien d'une augmentation rapide de la productivité qui est l'origine directe de la détérioration de l'emploi. L'aggravation du chômage au cours des années 1970 en France a été bien plus considérable encore qu'au cours des années 1930. Le bond en avant de 1975 (300m chômeurs de plus en 1 an) a dépassé tous les précédents historiques (pour la France). La montée du chômage s'est poursuivie de façon quasi ininterrompue jusqu'à maintenant. Fin 1981: 2 millions de chômeurs, i.e 9% de la population active. L'importance du chômage interdit de considérer la rupture de 1974 comme "moins grave" que la dépression de 1929. Effondrement de la fécondité et de la natalité. Inégalités de niveau de vie. La rupture de 1974 est donc simplement différente et non moins grave.
2) Les origines de la rupture et les facteurs cumulatifs de freinage:
J.H.Lorenzi, O.Pastré, et J.Toledano (La crise du XXème siècle, Economica, 1980) énumèrent quatre facteurs déterminants de la crise: "l'épuisement des formes de consommation triomphantes", la "tertiarisation de l'économie", la "croissance brutale des dépenses de l'Etat et l'effondrement des gains de productivité; rejet des explications superficielles par la hausse des prix du pétrole, et la concurrence des "NPI".
a) Le choc pétrolier: Le point de départ des hausses pétrolières se situe en décembre 1970. La hausse de 1973-1974 est massive, puisqu'en janvier 1974, le prix du pétrole a presque quadruplé par rapport à septembre 1973. Cette rupture soudaine implique une hausse des coûts de production et un prélèvement de revenu ordinairement désigné sous le nom de hausse de la "facture pétrolière". Gigantesque problème de transfert: ce transfert, par son ampleur, ne peut guère se comparer qu'aux réparations de guerre exigées de la France en 1871 ou de l'Allemagne après 1918. Evaluation de la "responsabilité" de la hausse du prix du pétrole dans l'accélération de l'inflation à partir de 1974: presque tous les modèles économétriques aboutissent à la conclusion paradoxale que la hausse pétrolière "explique" seulement deux points au plus de l'accroissement du taux d'inflation. En fait, tout dépend de savoir si on considère uniquement les répercussions mécaniques de la hausse pétrolière, ou si on considère l'impulsion communiquée à l'inflation en tant que processus dynamique. La recrudescence de l'inflation à ce moment précis ne résulte pas d'une coïncidence fortuite, et le "choc" était encore loin d'être absorbé au bout d'un an. Cela dit on ne saurait pour autant écarter la responsabilité des déséquilibres préexistants (antérieurs à 1973).
b) Les antécédents de la "crise": Il a été facile de découvrir après coup les "signes précurseurs" de la crise dans la croissance des années 1965-1973. Les uns se situent du côté de la demande: saturation quant à l'équipement des ménages. D'autres interviennent du côté de l'offre, i.e des conditions de production: développement du tertiaire (freinage sur la progression moyenne de la productivité de l'économie dans son ensemble). Enfin, à la jonction de l'offre et de la demande, l'accumulation du capital soulève plusieurs questions cruciales: y a-t-il fléchissement de la productivité ou de la rentabilité du capital? etc. La thèse d'une crise inéluctable même si la hausse du prix du pétrole n'avait pas eu lieu ne sera jamais ni démontrée ni infirmée... Vers 1973, la France est déjà "installée dans l'inflation". Les investissements des sociétés reposent de plus en plus sur l'endettement. L'alourdissement des charges financières est aggravé par la montée des taux d'intérêt, liée précisément à l'inflation. Enfin l'inflation mondiale ne saurait être dissociée de l'inflation mondiale.
c) Les enchaînements stagflationnistes: le terme de "stagflation" désigne la combinaison d'un faible niveau d'activité et d'une hausse inflationniste des prix, et ceci remet donc en cause les bases mêmes des politiques keynésiennes. L'incidence de la hausse pétrolière a été relayée, puis amplifiée par la hausse des salaires, puis des charges sociales, avec pour résultat une modification très brusque du partage salaires-profits. Chute de la rentabilité du capital. Ce n'est pas l'érosion préalable des profits qui a déclenché la crise, mais la chute brutale de la rentabilité qui est une conséquence de la rupture de 1974. Ample mouvement de destockage de la part des entreprises au cours de l'année 1974, en réaction à la hausse des coûts de production. Brutale baisse de la capacité d'autofinancement, chute de l'investissement. La conviction générale que la période d'expansion exceptionnelle d'après-guerre est définitivement révolue devient l'obstacle le plus direct à toute "sortie de crise".
Le comportement de l'économie française depuis 1974:
a) limites de la dépression: Trois groupes de facteurs peuvent expliquer que la rupture de 1974 ait entraîné un simple ralentissement de la croissance, au lieu d'une profonde dépression. Tout d'abord, l'évolution relativement favorable des revenus personnels: progression soutenue des salaires réels jusqu'à la fin des années 1970. Mais c'est surtout la meilleure résistance de l'emploi face à la crise, la lenteur de l'ajustement des effectifs, la moindre diffusion du chômage partiel qui constituent la différence essentielle avec la dépression des années 1930. Indemnisation bien plus complète du chômage que dans les années 1930. Accroissement des dépenses publiques, rôle de "stabilsateur automatique": dépenses qui varient en raison inverse de la conjoncture. Le déficit budgétaire n'est plus considéré a priori comme un mal absolu. On aurait tort aussi d'exagérer l'opposition à cet égard avec les années 1930. Ce n'est donc pas, à proprement parler, une politique "keynésienne" de soutien à la demande globale qui peut être créditée d'avoir limité la dépression des années 1970. Baisse absolue des investissements des administrations, mais dynamisme des investissements des entreprises nationales. S'il ne fallait retenir qu'un seul élément, c'est sans doute l'absence d'effondrement du commerce international qui doit être considéré comme la différence décisive avec l'évolution des années 1930. Le volume des exportations françaises, qui avait diminué de 44% entre 1929 et 1935, a au contraire augmenté de 50% entre 1973 et 1979...
b) L'économie française face à la concurrence mondiale: Redressement très sensible des termes de l'échange entre 1975 et le "second choc pétrolier" de 1979. L'émergence des "NPI", exportateurs de biens de consommation manufacturés, constituent un autre fait marquant des années 1970. Les différentes économies industrialisées ont fait preuve d'une capacité d'adaptation très inégale, et le clivage s'est rapidement accentué entre deux groupes de pays. Le premier groupe (Allemagne, Japon) a réalisé une adaptation remarquable: rétablissement d'excédents extérieurs,... Le second groupe de pays (Italie, Grande-Bretagne) présente jusqu'à la fin des années 1970 des caractères inverses. Le cas de la France est plus complexe: position intermédiaire. L'économie française réalise une performance honorable. Sa part dans le total mondial des exportations évolue favorablement. Le secteur agro-alimentaire, les services contribuent également à l'amélioration du solde extérieur, mais le taux de pénétration du marché intérieur progresse de façon quasi parallèle à l'essor des exportations. C'est donc la montée et l'"approfondissement" du chômage plutôt qu'une performance économique inférieure à la moyenne, qui justifie un jugement pessimiste sur l'ensemble des années 1970.
c) L'échec des politiques de relance: Les gouvernements ont été désemparés face à la rupture des années 1970, les problèmes ne relevant d'aucunes des thérapeutiques éprouvées. Une politique énergétique a été mise en place, avec pour objectif de réduire la dépense énergétique française. Résultats modestes, mais quasi-stabilisation de la consommation de pétrole. En ce qui concerne les politiques de relances, 3 phases bien distinctes peuvent être individualisées jusqu'en 1981. Tout d'abord, le gouvernement Chirac mène en 1975 une politique résolument expansionniste: il réussit à limiter l'ampleur de la dépression mais au prix de l'inflation la plus forte jamais enregistrée depuis un quart de siècle. Le gouvernement Barre, dans un premier temps, jusque vers 1977, attribue la priorité à la lutte contre l'inflation sans parvenir à ramener le rythme de l'inflation en deçà de 10%. Puis, dans une seconde phase, l'axe de la politique du gouvernement Barre se déplace implicitement de la lutte contre l'inflation vers la restauration des profits des entreprises: l'objectif prioritaire est de susciter une relance des investissements privés, à travers le rétablissement du partage salaires-profits antérieur à 1973. Mais la reprise attendue des investissements des entreprise ne se produit pas: c'est l'échec de la politique de relance.
Crise capitaliste, amputation des profits, freinage de l'accumulation du capital sont, par définition pour ainsi dire, étroitement associés, et il n'y a pas lieu d'opposer à cet égard la crise des années 1970 à celles du passé. La dimension internationale de la crise doit nécessairement tenir une place centrale dans toute interprétation d'ensemble. Rétrospectivement, 2 traits dominants caractérisent le quart de siècle de croissance ininterrompue de l'après-guerre. D'abord, l'interaction entre les gains de productivité particulièrement élevés et la progression non moins rapide du pouvoir d'achat des alaires et des niveaux de consommation. Ensuite l'internationalisation et l'interdépendance croissante entre les économies nationales. Le problème, en fin de compte, n'est pas tant l'approfondissement des écarts au détriment de certains pays, que l'incapacité des économies les plus puissantes (Etats-Unis) ou les plus "équilibrées" (Allemagne, Japon) à créer les conditions d'une reprise mondiale.

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